29/07/2018

26. révélation

[construire une ville avec des mots]

Se souvenir de la perception de la ville puis s’en éloigner pour mieux y revenir. Etre là quand la ville s’impose comme une évidence, une nécessité. Fusion de bitume, béton, pierre et verre. Une communion de l’ordre de l’intime s’installe pareille à une caresse mémorielle et sensuelle et devant soi, à perte de vue, un espace urbain démesuré aux lignes horizontales et verticales rappelant une œuvre digitale de Miguel Chevalier. La ville s’étale, imprime dans le sol son ADN singulier. Et cet appel irrationnel, murmuré en une douce confidence, inscrit en filigrane au plus profond de soi une marque indélébile. Vivre la ville comme si c’était la première et la dernière fois. Visions vertigineuses qui se succèdent à perte de vue. Avenues qui n’en finissent pas d’en finir. Lignes verticales étourdissantes se perdant dans le spectre solaire. Superposition d’étages jusqu’à ne plus savoir compter. Succession de rues parallèles et perpendiculaires, tracés géométriques. La ville déplie son aura sur les deux vecteurs, prend du volume et s’écrit de l’intérieur. Se souvenir aussi des sensations singulières délivrées par la ville au petit matin, dans la journée, le soir tombé. Savoir repérer aux sons diffusés le tempo imposé par la cité. Se souvenir des bruits de la nuit, de l’odeur des fastfoods, de la fumée blanche qui s’échappe des plaques d’égouts. S’imprégner des battements imperceptibles du cœur de la ville. Descendre dans ses entrailles. Emprunter l’Express train et filler à toute allure vers un ailleurs sur le point de s’écrire. Se dire qu’à ce moment précis de sa vie on a peut-être atteint son bout du bout du monde.


[contribution atelier F. Bon - Tiers livre été 2018]