31/01/2009

brève2nuit [54]

marcher, marcher, marcher
s'enfoncer dans les rues étroites, profondes, sombres
là où le froid s'installe quotidiennement
là où jamais le soleil ne plonge
là où l'humidité ronge les esprits chagrins
marcher, marcher, marcher
s'engouffrer dans des impasses nauséabondes, écœurantes, dégoûtantes
là où l'issue est certaine
là où personne ne se promène
là où la fin s'inscrit sur les portes défoncées
marcher, marcher, marcher
se terrer dans un coin 
là où même les chiens errants ne vont plus
là où règne la déchéance
là où plus rien n'existe
marcher, marcher, marcher
et puis se taire à jamais

30/01/2009

brève2nuit [53]

7h58
rue des secrets
elle et lui
lui et elle

8h07
rue d'amsterdam
lui et elle
elle et lui

8h42
rue de la verrière
elle et elle
lui et lui

9h28
rue des fossiles
elle et toi
toi et lui

10h00
rue des souvenirs
elle et lui
sur une plaque


29/01/2009

brève2nuit [52]

front de mer. ville de front de mer. promenade en front de mer. première ligne. ils furent. tous sauvagement agressés par des tonnes de liquide salé. front de rien. front pour rien. rien du front. c'est toute l'absurdité du propos.

28/01/2009

brève2nuit [51]

la ville, mutilée. la ville traumatisée. la ville, plaie béante, panse ses entailles, contusions, fêlures, ecchymoses, cicatrices. choquée par la violence des coups portés. ébranlée par tant d'épreuves à surmonter. la ville, fière, relève la tête, retrousse les manches et reconstruit demain. 

27/01/2009

brève2nuit [50]

absence de brise. montée du silence. moite. pesant. enrobant. un monde étrange prend place, installe des intervalles. des pauses de plus en plus étirées, de plus en plus espacées. formation d'un vide insondable, immatériel, impalpable. dans nos consciences, une alarme branche ses antennes. bip, bip, bip. l'attente commence. insupportable, incontrôlable, imprévisible. 4h26, marée haute, coefficient 58. heureusement. tous le pensent, personne ne le dit. évitée, la marée d'équinoxe. le vent forcit. les rafales deviennent puissantes, imposantes, tourbillonnantes. retenir son souffle. faire comme si. écouter les inquiétants rugissements d'un élément déchaîné. attendre le levé du jour. espérer un passage rapide. prier. pourquoi pas. 8h00, l'heure entre. premières lueurs. cauchemar. désolation. les rafales se succèdent. toujours, encore. pour combien de temps. le front passe, lentement. épuisement. découragement. pleurs. colère. c'est la valse des pins. tête en bas. cassés, blessés, éventrés, écorchés, décapités, sectionnés, défigurés, dévastés, explosés. 

26/01/2009

brève2nuit [49]

quand la ville silence
quand la ville attente
quand la ville écoute
quand la ville redoute
quand la ville veille
quand la ville sursaute
quand la ville rouspète
quand la ville retient son souffle
quand la ville à peur
quand la ville tempête
quand la ville chavire
quand la ville subit
quand la ville résiste
quand la ville craque
quand la ville inonde
quand la ville égratignée
quand la ville blessée
quand la ville éventrée
quand la ville déchirée
quand la ville traumatisée
quand la ville défoncée
quand la ville essoufflée
quand la ville exténuée
quand la ville meurtrie
quand la ville défigurée
quand la ville démunie
quand la ville panse
quand la ville rassure
quand la ville avance
quand la ville après

25/01/2009

brève2nuit [48]

ville muette, ville défaite, ville meurtrie. black-out 2.

24/01/2009

brève2nuit [47]

tempête sur la ville. black-out

23/01/2009

brève2nuit [46]

à petits pas, à petit temps, à pas lents, à temps là
cliché, elle promène son chien
son chien au bout de la laisse
la laisse de cuir
cuir
à grands pas, à gros temps, à pas de géant, à temps plein

22/01/2009

brève2nuit [45]

comme un guetteur, comme un veilleur, comme un imposteur, l'homme au feutre noir, emmitouflé dans sa gabardine au col relevé, arpente la rue.

21/01/2009

brève2nuit [44]

dans la chambre du fond, un nourrisson dort. la fenêtre ouverte invite à humer les senteurs des mimosas en fleur. l'air introduit un brin de fraîcheur et tapisse la pièce d'un avenir aux accents incertains. posée sur la commode ancienne, à droite de la fenêtre, une vieille horloge bat la mesure en claudiquant. le miroir pose, de travers. le portrait d'une ancêtre, d'habitude si jovial, se tord et se craquelle en une grimace déplaisante. un léger souffle traverse la pièce et se rompt. une porte s'ouvre brutalement. un cri déchirant absorbe tout l'espace. un miaulement strident lui fait écho. la bête sauvage s'enfuit par la fenêtre toujours ouverte. dans la chambre du fond, un nourrisson dort, pour toujours.

20/01/2009

brève2nuit [43]

le corps qui bouge, le corps qui marche, le corps qui respire, le corps qui se tortille, le corps qui, le corps qui, le corps qui
dans la nuit profonde d'une ville sans sommeil
le corps qui se tord, le corps qui transpire, le corps qui s'étire, le corps qui vomit, le corps qui pourrit, le corps qui, le corps qui, le corps qui
dans le square glacial d'un matin sans lendemain
le corps qui s'enfuit, le corps qui persiste, le corps qui grossit, le corps qui s'ennuie, le corps qui sourit, le corps qui s'appuie, le corps qui, le corps qui, le corps qui
dans le jour qui se désagrège sans espoir de retour

19/01/2009

brève2nuit [42]

quel est le nom de cette rue?
t'en souviens-tu?
tu sais, celle qui t'a vu naître?

étrangeté des noms de rue qui nous échappent, dorment dans l'ombre de notre mémoire sans vraiment remonter à la surface. engloutis à jamais.

rue du moulin, rue des remparts, impasse du souvenir, cours des quatre saisons, rue des fleurs,
rue de la messagerie, boulevard du retour, rue des incertains, rue de la roue, impasse du levant, promenade du château d'eau, rue des revenants, cours du mascaret, impasse de l'entrepôt,

et bien d'autres encore.

17/01/2009

brève2nuit [41]

tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche tête d'affiche

brève2nuit [40]

oublier le flux tendu des passants pressés dans la rue
oublier les regards vides croisés à la sauvette dans la rue
oublier les regards droits, billes fixes dans la rue
oublier les regards provocateurs, feux de paille dans la rue

oublier le violent coup d'épaule d'un piéton courant dans la rue
oublier la bousculade, corps tendus, corps branlants dans la rue
oublier la dégringolade de la 347e marche de l'escalier dans la rue
oublier l'empoignade de deux hommes dans la rue

oublier les vapeurs d'essence dans la rue
oublier les bruits parasites dans la rue
oublier les odeurs des poubelles éventrées dans la rue

oublier l'instant d'avant dans la rue
dépasser l'ennui de l'attente dans la rue
partir vers un ailleurs lointain dans la rue

16/01/2009

brève2nuit [39]

le jour se lève sur la ville encore endormie. ville de papier mâché. ville de cartons superposés, éventrés. illusion d'un petit matin tranquille qui n'en finit pas de répéter la scène du lever. arrêt sur image. gros plan. coupez!

15/01/2009

brève2nuit [38]

le froid le vent
le froid la neige
le froid la glace
le froid le verglas
tétanisée par des températures négatives
la ville grince tel un gond jamais entretenu
le vent la pluie
le vent la tempête
le vent le grésil
perdue dans des limbes mystérieuses
la ville glisse progressivement sur les pentes de l'oubli
la pluie l'orage
la pluie le nuage
rincée par une averse torrentielle
la ville flotte parmi les soupirs de désolation
l'orage un cri
ensevelie dans l'abîme indéfini des souvenirs égarés
la ville s'abandonne au néant
un cri

14/01/2009

brève2nuit [37]

sous le pont de la ville, une vie s'organise — cartons, journaux, sacs poubelle, caddie, couverture déchirée, casserole cabossée, cuillère tordue, réchaud de fortune, bassine éventrée, bonnet mité, mitaines trouées, écharpe Old River, manteau élimé, corps recroquevillé, respiration saccadée, os glacés — et la neige continue de tomber.

13/01/2009

brève2nuit [36]

ville qui brûle
ville qui souffre
ville touchée dans son cœur
ville qui crie
ville qui hurle
ville déchirée dans son âme
ville qui se détruit
ville qui se ratatine
ville emportée par un souffle destructeur
ville poussière
ville cimetière

12/01/2009

brève2nuit [35]

elle entendit les semelles ferrées de l'homme résonner dans la rue. ce soir encore, à l'heure où la nuit bascule vers un autre jour, il était là, faisant les cents pas sous sa fenêtre. au travers des lattes des persiennes, elle avait repéré sa silhouette élancée revêtue d'un imperméable couleur sable au col soigneusement relevé et coiffé d'un chapeau en feutre tellement sombre qu'il lui était impossible d'entrevoir les traits de son visage. cet inconnu, à la précision d'un métronome, lui glaçait le sang. sa présence représentait un mystère. pour endormir sa frayeur, elle compta les pas. vingt-sept de gauche à droite et vingt-six de droite à gauche. en aurait-elle manqué un? un mois venait de s'écouler et cet inconnu prenait une place qu'il n'aurait jamais dû occuper. elle se mit à l'attendre. espérer qu'il arrive plus tôt. et s'il ne venait plus? dès qu'elle repérait le rythme de sa marche, sa peur reprenait le dessus. sa raison s'anéantissait sous l'effet du retour de l'inconnu. elle aurait préféré qu'il cesse ce jeu stupide sur le champ. une nuit de décembre, plutôt douce pour la saison, une jeune femme menue, dont le regard ne captait plus les petits signes de la vie, s'approcha de lui. il se retourna et eut juste le temps de rattraper son corps qui basculait sur la chaussée. il emporta la femme dans ses bras et depuis ce jour-là, jamais elle ne le revit, mais le son des pas claquant sur le trottoir habitent toujours sa mémoire.

11/01/2009

brève2nuit [34]

dans la rue saint-pétersbourg, la neige fond.

10/01/2009

brève2nuit [33]

derrière le restaurant de la rue des vautours, les couvercles des poubelles volent.

09/01/2009

brève2nuit [32]

plus le choix. elle doit partir. tout laisser derrière elle. dehors un froid intense transperce violemment la fine étoffe de son manteau. pas le choix. affronter l'hiver glacial. surmonter ses peurs. chevaucher ses doutes et les larguer quelque part au fond d'une impasse à sens unique. avancer à pas lents, face au vent et tenter une feinte pour échapper à la rafale la plus affirmée. se dire que ce n'est décidément pas le jour pour entreprendre ce genre de départ. pas le choix. se dire que finalement la situation pourrait être pire. pas le choix. se réconforter en pensant que ce serait fait. pas le choix. et puis oublier le froid, le vent, les rafales et la peur. se mettre à courir. entendre ses pas résonner dans la rue. vide. vide de ses mouvements habituels. se souvenir de ce qu'elle était. se souvenir de l'instant d'avant et projeter le suivant dans un espace meilleur. pas le choix.

07/01/2009

brève2nuit [31]

un ballet au fond de l'impasse
et quoi de plus
un ballet au fond de l'impasse
et tombe la nuit

brève2nuit [30]

fuir la ville de nuit
entamer une longue marche éprouvante
sentir le regard intérieur
écarter les morsures du vent, craquelures et engelures
délaisser les valises plombées
égrainer les souvenirs le long de la route de l'exil
cacher l'argent gagné dans la doublure d'un manteau
protéger les bijoux précieux dans les revers du pantalon
soupirer profondément
témoigner du vide existentiel d'un départ précipité
soutenir les corps amputés de leur force
et une vie en devenir

06/01/2009

brève2nuit [29]

lignes fuyantes des villes au profil géométrique

05/01/2009

brève2nuit [28]

une écharpe s'envole
s'enfonce dans la nuit profonde
pour se perdre au bord de nulle part
elle était rouge
rouge sang
comme le sang qui coule maintenant le long du caniveau
comme le sang qui appartient à cet homme
cet homme étendu sur le trottoir
un couteau planté entre les deux omoplates

04/01/2009

brève2nuit [27]

pourquoi quelqu'un

03/01/2009

brève2nuit [26]

les semelles blanches de ses chaussures neuves
c'est tout ce dont elle se souvient
les semelles blanches de ses chaussures neuves

zoom arrière
un attroupement de gens abasourdis
des petits cris étouffés
des regards qui se détournent
des visages qui pâlissent

zoom avant
elle se fraie un passage
encore une rangée d'individus incrédules
bandes de limitation de périmètre
elle atteint la zone de non retour

une fillette en robe blanche
baigne dans une mare de sang écarlate
son sang
le trottoir est souillé
pour un temps seulement

les semelles blanches de ses chaussures neuves
c'est tout ce dont elle se souvient
les semelles blanches de ses chaussures neuves

02/01/2009

brève2nuit [25]

une ligne de tramway s'est perdue quelque part dans la ville
une ligne de tramway s'est perdue quelque part dans la ville
une ligne de tramway s'est perdue quelque part dans la ville
une ligne de tramway s'est perdue quelque part dans la ville
une ligne de tramway s'est perdue quelque part dans la ville
une ligne de tramway s'est perdue quelque part dans la ville
une ligne de tramway s'est perdue quelque part dans la vile
connaissez-vous la nouvelle?
une ligne de tramway s'est perdue quelque part dans la ville

01/01/2009

brève2nuit [24]

la pluie ruisselle dans tous les caniveaux de la ville. l'eau s'échappe, insaisissable, ininterrompue. flux continu qui s'enfuit vers un destin incertain.