7. là tout auprès mais
[construire une ville avec des mots]
Photo by Dominique Paillard |
7. là tout auprès mais
Le souvenir était toujours présent. Le nom de la ville, le passage devant des immeubles, l’étroite départementale, le petit pont enjambant le ruisseau et le virage au loin. Des flashes lui revenaient à la mémoire par saccade comme un film monté au début du siècle dernier. Les conditions semblaient être réunies pour atteindre son but. Mais tout finissait par se brouiller. Elle tournait en rond dans la ville : revenait sur ses pas, au niveau du panneau indicateur du nom de l’agglomération faisait demi-tour, entrait à nouveau dans la ville, empruntait des rues qu’elle ne reconnaissait pas ou plus, avançait à l’instinct. Attentive à tous signes évocateurs d’un passé qui resurgissait par fragment, elle avançait sans jamais trouver la faille, celle qui dévoilerait l’accès au petit pont. Elle le cherche avec obstination ce petit pont qui la mettrait sur la voie. Elle sait qu’en le traversant, sur la droite, la route se déplierait devant elle, se révélerait comme dans le passé, comme dans son souvenir. Elle freine. Intersection. A droite ou à gauche ? Retour sur ses pas. C’est agaçant ! Elle est si proche pourtant. Nouvelle tentative. Repartir du parking des immeubles. Remonter la rue, tout droit. Rouler, rouler, rouler… trop loin. Rebrousser chemin. Il suffirait qu’elle repère enfin cette route introuvable, mais si proche. Elle la sent, la ressent, elle n’est pas loin. Elle le sait. Mais aujourd’hui, il faut l’admettre, la voie est sans issue.
[contribution à l'atelier F. Bon - Tiers livre 2018]