#1 Interview - vers un écrit film
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Photo by Dominique Paillard |
"vers un écrit film, #1 | un renversement Koltès
Koltès écrit le film qu'il ne fera pas, on
prend un fragment de film pour en faire
écriture"
Interview
Visage
00’33’’Gros plan fixe sur un visage, ridé. Celui d’une femme.
Cheveux châtain foncé, fins et longs, tirés en arrière et certainement retenus par une barrette.
Une paire de lunettes ovales, monture métallique.
Seule marque de maquillage : un trait noir au dessus de ses yeux sombres en guise de sourcils.
Et lorsqu’elle commence à parler, sa bouche fine laisse entrevoir l’existence d’une seule dent dépassant sournoisement de sa mâchoire supérieure, comme si elle était suspendue et souhaitait effectuer un numéro d’équilibriste.
Elle s’exprime en remuant la tête de bas en haut et en articulant.
Elle se présente : « Mon nom est T., j’ai 73 ans. »
Ecran noir
00 :43 Musique (accordéon ?). Son nom apparaît, à droite de l’écran, lettres blanches sur fond noir.
La rue
00 :48 Large. Plan fixe et même musique au thème répétitif. La caméra s’est posée au centre de la rue et fixe le point d’horizon. Dominante de jaune et de vert.
De chaque côté, surplombant quelques résidences, de grands feuillus. L’ombre des feuillages frémissant sous le vent caresse l’asphalte. Deux voitures sont garées le long du trottoir, à gauche. De petites barrières en bois blanc délimitent les propriétés.
La porte
00 :53 Gros plan fixe sur la boîte aux lettres suspendue à côté de la porte. N° 18. Au dessus de la boîte aux lettres, une affichette retenue par un large ruban adhésif gris. Une inscription est ajoutée à droite d’une croix coloriée en orange :
Dieu est mon co-pilote
L’ombre d’un arbuste se reflète sur la vitre de la porte.
La femme
00 :56 Mouvement de caméra qui descend vers la femme assise dans un fauteuil de jardin en métal blanc, devant son porche. Mains et jambes croisées, la tête légèrement inclinée sur sa droite, à gauche pour nous. Elle porte une robe longue à dominante noire sur un chemisier rouge à manches longues, des chaussettes blanches dans des chaussures ouvertes sombres.
Toujours la même musique, le même instrument, le même thème.
01 :05 Gros plan sur son visage mat baigné par le soleil. Les yeux, interrogateurs, fixent l’objectif. Une mèche de cheveux voltige sur son front.
Fondu.
01 :10 Format paysage.
Prise de son en direct. Le vent souffle. On l’entend dans le micro.
Theresa est toujours assise dans la même position et parle d’une voix posée, distincte.
Derrière elle, on devine le porche da sa maison en bois. On y retrouve un canapé bas aux coussins dépareillés, une plante dans un grand pot en terre, une table basse en bois où sont posés deux abris bois pour oiseaux (l’un gris, l’autre rouge), un sac plastique, des rubans, un chapeau de paille.
Elle se présente, parle d’elle, de sa vie.
01 :20 Gros plan sur son visage. Il lui manque des dents à la mâchoire supérieure, seule une incisive reste visible, toujours la même.
01 :34 Plan plus large. Elle raconte l’histoire de sa vie. Elle aime l’écrire et aussi écrire des poèmes.
Les cinq incisions dans son récit :
01 :45 Contre plongée sur les mains de Teresa. Gros plan d’une photo de mode dans un magasine.
02 :13 Plan fixe et rapproché sur les mains de Teresa. Bruit d’une bobine qui film. Au moins trois bagues à chaque main, certains doigts portent plusieurs bagues. Elle range avec précipitation une feuille pliée en boule dans un petit sac de toile.
02 :42 La camera montre un poème écrit par Theresa, signé de son nom.
03 :11 Elle montre l’autre côté de son texte.
03 :54 Idem. Gros plan sur les mains et la feuille.
Elle parle, évoque sa jeunesse, son mariage, sa maison, le cinéma, l’écriture, Dieu, la drogue, la solitude.
Fin
04 :21 Prise de vue de sa maison de l’autre côté de la rue. Grand angle, déformation de l’image fixe. Un pick-up noir traverse l’écran de gauche à droite.
Musique : harmonica.
04 :30 Zoom avant sur Teresa, mise au point saccadée, puis gros plan de son visage.
Fondu.
04 :29 Ecran noir.
[contributions à l'atelier François Bon - Tiers Livre]