01/02/2009

brève2nuit [55]

elle se disait qu'elle pourrait sortir, prendre l'air, aller se promener, se changer les idées. elle se disait qu'il n'était pas trop tard, quelle avait encore le temps d'attraper un tramway et de fouler l'herbe flétrie du jardin des douces pensées. elle se disait que oui, c'était une bonne idée. le temps se rafraîchissait, mais le fond de l'air la stimulerait dans sa promenade tardive. elle se voyait déjà enfilant son manteau en lainage usé par les longs hivers tristes et glacés qui faisaient partie de sa petite vie sans joie ni tragédie d'ailleurs. elle se disait que pour une fois, elle pourrait prendre le tramway, celui qui passe au coin de sa rue, celui qui la nargue tout les jours dès qu'elle sort comme s'il lui en voulait de ne pas suivre son trajet, comme s'il voulait lui faire regretter son manque d'attention. s'il savait. elle se disait qu'elle reviendrait par les rues et les ruelles du quartier, celles qui longent la voie de chemin de fer désaffectée. elle marcherait d'un bon pas, juste pour garder le rythme de la marche, pour ne pas se laisser distraire sur le chemin du retour. des images flotteraient dans sa tête et elle se laisserait bercer par le doux parfum des mimosas en fleur. elle se disait qu'il serait agréable de rentrer et de se faire chauffer un bol de lait qu'elle sentirait s'écouler le long de sa trachée. des instants de charme, des petits riens de plénitude. elle se disait que le temps passait vite et que le bol de lait, elle le dégusterait bien sans tarder. elle se remémorait toutes ces pensées lorsque le dernier tramway vint à passer.